Les résultats des élections aux Pays Bas marquent une nouvelle étape dans l’effondrement de la social-démocratie européenne. Celle-ci suit à l’échelle du sous-continent la voie ouverte par le Pasok en Grèce.
Les yeux rivés sur la potentielle poussée de l’extrême droite, les médias bourgeois sont presque tous passés à côté du principal résultat des élections néerlandaise. La faillite des travaillistes. Ils divisent leur score par 4, passent de 38 sièges et 24,8 % à 9 sièges et 5,7 %.
Cette déconfiture s’inscrit plus largement dans celle de la coalition sortante. Les travaillistes dirigeaient le pays conjointement avec la droite conservatrice. Celle ci se maintien en première position mais perd aussi des voix. Elle passe de 41 sièges et 26,5 % à 33 sièges et 21,3 %.
Les deux partis coalisés, qui avait réunis ensemble près de la moitié des suffrages, n’en comptent plus qu’un quart.
C’est le résultat d’une violente politique d’austérité menés par cette coalition. Citons notamment le recul de l’âge de départ à la retraite, qui passera à 67 ans dans quelques années. Une loi de plafonnement des indemnités de licenciement. Des mesures pour précariser les emplois, qui ont incités les entreprises à multiplier leurs recrutements en CDD au détriment du CDI. Le cocktail classique.
C’est toute la social-démocratie européenne qui s’écroule.
Parmi les précurseurs, le PASOK. Le parti grec à connu une chute encore plus spectaculaire que les néerlandais. Il est passé en quelques années de 44% à autour de 5, soit une division par près de 9 de son score électoral. Cet effondrement à coïncidé avec sa participation à un gouvernement d’union nationale avec la droite (ND) et un petit parti d’extrême droite (LAOS) visant à mettre en œuvre une politique d’austérité violente.
C’est aussi le cas du parti travailliste irlandais. Lui aussi partie prenante d’une coalition avec la droite jusqu’en février 2016, il passe de 19,4 % à 6,6 % .
En Allemagne le SPD avait obtenu 40,9 % aux législatives de 1998. Leur score est tombé à 25 % en 2013. Ils se sont ensuite allié avec la droite.
En Espagne, le PSOE est arrivé deuxième des dernières élections, mais avec 22 % des voix, il réalise l’un des plus faibles résultats de son histoire. La France s’inscrit à priori dans cette tendance.
Il est loin le temps, entre 1997 et 2002, ou la social-démocratie comptait jusqu’à douze gouvernements dans l’Union européenne (UE). C’est que la crise est passée par là. Or, si on résume le projet social-démocrate il s’appuie sur 3 piliers:
1. Renforcer l’intégration capitaliste européenne. ( Euro, plus de fédéralisme, investissement européens.)
2. Accompagner les mesures d’ajustements structurels (privatisations, précarité, bas salaires, coupe des retraites, de la sécu, du chômage).
3. Mettre en place quelques mesures sociales minimales contre « la grande pauvreté ». Afin de limiter les risques d’explosion sociale.
On retrouve ce schéma ailleurs qu’en Europe. C’était aussi la ligne politique du PT brésilien (( Qui s’est fait évincer dernièrement au profit de la droite, dans une sorte de coup d’état éclair)) ou encore de l’administration Obama.
Un projet : faire le bien du capitalisme malgré lui.
La ritournelle de la social-démocratie est simple : « le capitalisme c’est vachement bien, mais les capitalistes y vont un peu trop fort ! » Et du coup la « cohésion sociale » est menacée. En plus c’est mauvais pour la croissance. Donc, pour le propre bien du capitalisme, il faut le « réguler ». Ce discours à ses idéologues, en France des politiques comme M. Rocard, J. Delors. Il a aussi ses philosophes, la figure de proue étant J. Habermas, inspirateur d’une charte des droits fondamentaux pleine de belles phrases vides.
Le point d’orgue du projet social-démocrate, c’est la constitution Européenne. Déjà, les tendances électorales qui allaient dans les années suivantes mettre à mal ce courant politique bourgeois était là, dans le rejet de la constitution en France en 2005.
Puis, vint la crise.
Tout commence à sentir mauvais avec la crise. La raison en est simple. Le capital doit faire remonter le taux de profit. Alors il montre les dents, impose la mise en place de mesures d’austérité partout. Et la social-démocratie applique sans rechigner. Là ou elle est au pouvoir, elle mène une politique parfois inverse de ce qu’elle venait de promettre dans la campagne électorale. C’est le cas par exemple de la Grèce, ou les socialistes s’étaient fait élire sur un programme de redistribution sociale.
Elle participe aussi à diverses coalitions, rappelées plus haut. Prenons les 5 pays les plus ciblés par le FMI : Le Portugal, l’Italie, l’Irlande, la Grèce et l’Espagne. Partout, les sociaux-traitres comme on disait dans le temps, sont dans la boucle des mesures contre les prolos. Comme en France, ou en Allemagne.
Partout, ils ont opté pour le suicide de leur formation politique en mettant en œuvre les réformes. C’est d’une logique sans faille. Car il s’agit d’un personnel politique de gestionnaires. Leurs financement provient d’ailleurs essentiellement des états et de l’union Européenne, pas des adhérents à leurs partis. C’est d’ailleurs depuis longtemps l’hémorragie dans leurs rangs, et désormais, par exemple en France, il s’agit surtout d’élus. Ceux-ci, voyant le vent tourner, cherche du coup à se recaser. Ici, ils lorgnent sur Macron. En Grèce, une partie du personnel politique du PASOK s’est dispersé dans quasi l’ensemble des partis : on en trouve à la fois à droite (Nouvelle démocratie, ND) au centre (une nouvelle formation centriste, To Potami) à « gauche » (Dimar, la gauche démocratique) etc.
Aujourd’hui, le capital est en ordre de combat.
L’austérité est loin d’être terminée. Les attaques contre les exploités sont amenés à se poursuivre et se renforcer. Car il n’y a plus de miettes à lâcher pour tenter de nous amadouer. C’est fini, le temps de la carotte soc-dem. Voici donc venu le temps du bâton. Il n’y a plus de place pour une politique social démocrate. Le gouvernement Valls l’a bien montré. Loi travail, loi Macron, ANI, répression violente, état d’urgence, partout la police…
Face à nous, la seule réponse est désormais la violence du maintien de l’ordre. Dans ce contexte, le « gentil flic » social démocrate n’a plus de place dans le duo. Il s’était de toute façon tellement rapproché du méchant flic qu’on ne voyait pas la différence. Place désormais à un nouveau duo : le méchant flic de droite et le très méchant flic d’extrême droite. Selon les pays, les deux gouverneront ensemble, ou alors l’extrême droite servira d’épouvantail pour faire accepter la droite.
Syriza, Podemos, France Insoumise et cie : les gestionnaires de rechange ne vendent pas de rêves.
Reprenant le flambeau social démocrate, une flopée de nouveaux partis à émergé en Europe. Syriza en Grèce, Podemos en Espagne et cie. Nous écrivions déjà à leur sujet il y a quelques temps :
De reniement en reniement, d’accord pourri avec les créanciers du pays en accords plus pourri encore, le gouvernement de cette fameuse gauche radicale s’est maintenu au pouvoir. Un peu comme dans ces concours ou l’on doit manger le maximum de hot-dog en temps limité, le gouvernement grec à avalé des dizaines de couleuvre en moins d’un an, et continue aujourd’hui à gérer un pays qui s’enfonce toujours plus dans la misère. Il organise les privatisations, coupe dans les retraites des plus pauvres… Bref fait exactement tout le contraire de ce qu’il promettait avant d’être élu… (sans compter l’alliance avec la droite souverainiste… l’article entier en suivant ce lien).
C’est qu’il n’y a tout simplement pas le choix, pour les capitalistes européens. Même les programmes somme toute très modérés de Syriza ( qui ressemblait à celui de Jospin en 2002) c’est trop. Pas de miettes, pas de bons alimentaires, que dalle.
La social-démocratie, même « radicale » est toujours du côté de l’ordre.
Mélenchon a beau faire de grands discours. Podemos idem. Souvenons nous du Chili d’Allende. (( Le Chili, gouverné par un front populaire avec à sa tête le socialiste Allende, fut renversé par un coup d’état dirigé par Pinochet et soutenu par les état-unis, le 11 septembre 1973))
Bien sûr, pourra t-on objecter, il s’agissait d’un gouvernement qui se disait socialiste, là ou les partis politiques actuels, France insoumise et cie, sont juste keynésiens : ils ne font pas peur à la bourgeoisie, c’est leur faire beaucoup d’honneur que cette comparaison.
Mais des leçons sont à rappeler dans tout les cas. En premier lieu, l’état capitaliste est au service… du capital. Et la sociale-démocratie, fut elle radicale, défend toujours l’ordre. Elle préfère systématiquement risquer l’ écrasement plutôt qu’une révolution sur laquelle elle n’aurait pas de prise. ((Qu’on pense à l’Allemagne du début des années 20, ou les sociaux démocrates ont écrasé la révolution dans le sang. Qu’on pense aussi à la manière dont tout les partis socialistes ont accepté la guerre de 14. Le gout pour l’ordre et le nationalisme des soc-dems ne datent pas d’hier. ))
Car la seule force sociale capable de s’opposer au capital, c’est les exploités. Quand on dit s’opposer, on parle dans la rue, par la grève. Mais aussi par les armes, pour défendre cette grève. En formant des barricades, pour se protéger des armes ennemies. Et dans l’offensive, pour éviter que les barricades ne soient encerclées et réduite.
Surtout, par la mise en œuvre de mesures communistes immédiates, pour s’attaquer au principal pouvoir des capitalistes : celui que leur procure l’argent.
Tout cela, dans une défiance totale envers celles et ceux qui prétendent nous représenter ou nous diriger. Regardez les. Nous sommes de plus en plus exploités eux n’ont que des appels au calme dans la bouche. Jusqu’à l’extrême gauche, ils condamnent les « casseurs » c’est à dire les exploitées en colère. Ils nous veulent de passifs électeurs et électrices. Qu’ils dégagent tous.