Avant la nasse, le tronçonnement. Comment diviser une manifestation ? Alors que la police est de plus en plus violente dans le cadre du maintien de l’ordre, il est de plus en plus important de savoir contrer les manœuvres de la police, collectivement et par la solidarité. Une des premières étapes est la compréhension de comment la répression se fait. Dans la lignée des articles sur le maintien de l’ordre de Tantquil.net, cet article explique une technique policière souvent utilisées contre les manifestations, et qui permet ensuite la mise en place de nasses…
Comprendre le maintien de l’ordre : une technique policière
Alors que la police est de plus en plus violente dans le cadre du maintien de l’ordre, il est de plus en plus important de savoir contrer les manœuvres de la police, collectivement et par la solidarité. Une des premières étapes est la compréhension de comment la répression se fait. Dans la lignée des articles sur le maintien de l’ordre de Tantquil.net, cet article explique une technique policières souvent utilisées contre les manifestations.
La première est la technique dite du « tronçonnement » ((Fabien Jobard, « Le spectacle de la police des foules : les opérations policières durant la protestation contre le CPE à Paris », European Journal of Turkish Studies. Social Sciences on Contemporary Turkey, vol. / 15, juin 2013, p. 29.)). Elle permet de sectionner le gros du cortège afin de maintenir un espace vierge autorisant l’action contre des « nébuleuses de jeunes violents » (nous reprenons ici les termes en usage dans les documents policiers). Pour les forces de l’ordre :
« Le tronçonnement est synonyme d’éparpillement de la foule. Très souvent, un cortège ou une manifestation interdits, de même qu’un attroupement sont composés d’éléments hétérogènes (femmes, enfants, militants, curieux, etc.) et quelquefois de groupuscules actifs participant à l’agitation de masse. En vue de faciliter un refoulement ultérieur, il est en certaines circonstances intéressant de séparer ces diverses parties en plusieurs tronçons afin d’obtenir une plus grande efficacité dans l’action engagée. Cette tactique de séparation obtenue par le tronçonnement est une suite possible et indépendante des refoulements en ligne, ceux-ci étant conditionnés par la topographie des lieux. Le tronçonnement peut être suivi d’un refoulement et d’une dispersion. »
DFPN/INFPN/DOC – septembre 2006. ((Ibidem, p. 30.))»
En gros c’est une application de la maxime « diviser pour mieux régner ». Cette technique est essentielle dans le maintien de l’ordre, car elle permet la séparation des manifestants. Cette séparation n’est pas seulement technique, elle est aussi politique. Dans une manifestation, dans un mouvement, l’état a pour objectif de séparer les manifestants « légitimes » et « pacifiques » et les manifestants « violents » qui d’ailleurs n’en sont pas vraiment puisque pour les hommes politiques et les médias, ce sont des « casseurs ».
Schéma tactique du tronçonnement issu du document précédent((Fabien Jobard, « Le spectacle de la police des foules. Les opérations policières durant la protestation contre le CPE à Paris », Réseau Européen d’Analyse des Sociétés Politiques, septembre 2010, p. 30.)).
Bien entendu, quiconque a participé à un mouvement sait que les choses sont bien plus complexes et que ces distinctions n’ont que peu de sens et ont vocation à figer et isoler les plus radicaux. Ainsi, courants sont les « pacifistes » qui excédés par des heures de gazages vont ramasser un caillou pour le jeter sur une ligne de flics, comme de nombreux « violents » vont bien souvent participer à des actions et rassemblements totalement « pacifiques ». De même, des grévistes résistant à une évacuation de fac ou de point de blocage par quelques pierres face à la violence policière sont-ils « violents » ou « pacifiques ».
La séparation entre bon manifestants « légitimes » et « casseurs du Black Bloc » est un outil politique aux mains de l’état pour affaiblir les mouvements et susciter des oppositions stériles. De plus, elle contribue à l’isolement des plus radicaux de la masse des manifestants et permet ensuite une répression d’autant plus forte d’autant qu’elle tente d’être séparée…
Le tronçonnement en est l’application concrète : à un moment le dispositif tactique acte la séparation et la répression peut commencer : nassages, gazages, matraquages… D’où l’interet de se poser la question de comment l’éviter en amont…